Fiscalité et Bourse : l'actionnariat individuel français en chute libre

Fiscalité et Bourse : l'actionnariat individuel français en chute libre

Le nombre d'actionnaires particuliers est en net recul depuis seulement deux ans, comme le montre le Livre Blanc dernièrement publié par l'Association nationale des sociétés par actions (ANSA).
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Rédigé par Nathalie Jouet

le 27 Décembre 2016

Fiscalite et Bourse

Le nombre d'actionnaires a été divisé par deux en 15 ans selon l'ANSA

La fiscalité punitive menée à l’égard des actionnaires par Bercy a eu des effets catastrophiques sur le tissu économique français.
Le nombre d’actionnaires a été divisé par deux en 15 ans, un constat préoccupant en France, comme le souligne l’ANSA dans son Livre Blanc intitulé « Agissons d’urgence pour la croissance ». Pour l’association, la situation est urgente car si l’investissement actionnarial n’est pas relancé rapidement, les entreprises manqueront de fonds propres ce qui impactera durablement la croissance en France.

Un actionnariat individuel dégradé et en situation de crise profonde

La situation est inédite en Europe et pèse lourdement sur la croissance et l’économie française. En effet, alors qu’en 1995 un actionnaire individuel était taxé en moyenne à 40 % sur ses dividendes, en 2015 ce taux est de 60 %. Conséquence : le nombre d’actionnaires individuels a baissé de moitié en France et la part de leur patrimoine financier investie en actions cotées directement ou indirectement est passée de 22 à 13 %. A l’origine de cette crise majeure, se trouvent des crises boursières répétées, l’augmentation de la volatilité mais également l’essor de l’intermédiation bancaire qui impacte celui de l’investissement direct. La principale cause de cette dégradation de l’actionnariat individuel reste la fiscalité excessive pratiquée depuis près de 25 ans, avec des taux de taxation sur les dividendes en nette progression.

Comme le rappelle l’ANSA, les dividendes perçus par un contribuable exonéré de l’impôt sur le revenu étaient taxés à 4,4 % en 1995 (impôts et charges sociales incluses). En 2015, le contribuable voit ses dividendes taxés à 49 %. De même, si ces contribuables ont vu leur tranche marginale d’impôt sur le revenu diminuer à 30 % en 2015, le taux de prélèvement sur les revenus du capital a, quant à lui, fortement augmenté pour atteindre 59,1 %.

Une fiscalité punitive et un réel manque d’ETI

Durant ces dernières années, les prélèvements fiscaux et sociaux n’ont cessé de s’alourdir pénalisant davantage l’investissement direct dans les entreprises. Avec des dividendes taxés à 59,1 %, une entreprise française réalisant un profit de 100 euros pourra proposer à ses actionnaires un dividende net de 23,60 euros, contre 53,70 euros en Italie ou encore 51,40 euros en Allemagne, selon l’ANSA. Cet exemple montre que le système français décourage inévitablement l’investissement en actions, ce qui limitera à terme le financement des entreprises et l’emploi. Plus étonnant encore, dans certains cas les prélèvements atteignent 105,4 % des dividendes, lorsque le contribuable est soumis au taux de l’impôt de solidarité sur fortune (ISF) le plus élevé. La France se démarque des autres pays européens à tous les niveaux : les entreprises sont soumises à l’impôt sur les bénéfices et aux multiples impôts locaux, l’actionnaire est soumis à l’imposition sur les dividendes et plus-values et à l’ISF qui peut se révéler confiscatoire dans certains cas, comme le précise l’ANSA.

L’autre élément qui pénalise considérablement la France est l’insuffisance d’Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI). En effet, les mesures prises par le gouvernement découragent les petites et moyennes entreprises (PME) qui souhaiteraient passer à la taille supérieure. Par ailleurs, les nombreuses PME françaises sont majoritairement des entreprises familiales dont la pérennité est faible. Aujourd’hui, la France compte 4 600 ETI, soit deux fois moins qu’en 1980, un chiffre bien insuffisant par rapport à l’Allemagne qui en compte 12 000 et l’Italie qui en a 8 000.

Douze propositions émises par l’ANSA pour relancer l’actionnariat individuel

Afin de relancer l’attractivité de l’investissement en actions, l’ANSA a adressé une douzaine de propositions aux responsables politiques. Les principales mesures suggérées par l’association sont : la modification du régime d’imposition des dividendes en faveur d’un système plus favorables aux contribuables, la réforme de la taxation des plus-values mobilières et la suppression de l’ISF jugé comme une charge fiscale trop lourde. L’ANSA propose de créer un PEA jeunes réservé aux personnes âgées de plus de 16 ans et cela pour encourager l’apprentissage des placements à risque auprès des jeunes générations. La transmission générationnelle doit aussi être favorisée et la liquidité des placements en non coté facilitée.

Si les Français sont actuellement les plus gros épargnants d’Europe, seules 30 % de leurs économies sont investies directement dans les entreprises, la majeure partie étant consacrée à l’assurance vie et au Livret A. Ce désintérêt envers l’actionnariat individuel remet en cause le financement des entreprises. Si les solutions proposées par l'ANSA ne sont pas rapidement appliquées, la situation pourrait devenir encore plus préoccupante.



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