Crédit Mutuel Arkéa prépare son indépendance

Crédit Mutuel Arkéa prépare son indépendance

La crise entre le Crédit Mutuel Arkéa et la Confédération Nationale du Crédit Mutuel change de dimension avec cette volonté officiellement affichée du premier d'obtenir son indépendance. Quelles sont les dernières étapes de ce processus ? Zoom sur une situation qui se crispe.
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Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 28 Janvier 2018

Crédit Mutuel Arkéa prépare son indépendance

Arkéa versus Confédération Nationale Crédit Mutuel : la guerre de sécession

Une nouvelle étape est franchie dans le bras de fer engagé entre la Confédération Nationale du Crédit Mutuel (CNCM) et l’une de ses composantes, le Crédit Mutuel Arkéa. Si autrefois la situation conflictuelle portait sur les règles de vie commune à l’intérieur du groupe, le Crédit Mutuel Arkéa enclenche officiellement des démarches le menant à l’indépendance.

Ce combat se traduit même sémantiquement dans les différents communiqués de presse. Le Crédit Mutuel Arkéa évoque un choix « de défense d’autonomie » entre « centralisation et indépendance », quand le CNCM dénonce « un projet de sécession » et revendique son « attachement à l’unité dans le respect de l’autonomie de toutes les fédérations ».

Depuis le 17 janvier, le Conseil d’administration du Crédit Mutuel Arkéa a « donné mandat aux dirigeants du groupe d’engager toute action permettant (…) de devenir un groupe bancaire coopératif et mutualiste indépendant, entièrement distinct du reste du Crédit Mutuel ».

Dès le 19 janvier, les fédérations du Crédit Mutuel de Bretagne et du Sud-Ouest ont approuvé le principe d’une consultation des caisses locales afin qu’elles valident ou non ce projet. La troisième fédération, le Crédit Mutuel du Massif Central, s’oppose à ce processus, désireuse de quitter le pavillon du Crédit Mutuel Arkéa.

Crédit Mutuel Arkéa toutes voiles dehors

Cette annonce vient suite à la décision rendue par la Cour d’Appel de Paris du 16 janvier 2018 qui confirme que l’unanimité n’est pas requise pour transformer les statuts juridiques du CNCM. L’organe central veut en effet passer du statut d’association à celui de société coopérative, « prélude à l’acquisition du statut d’établissement de crédit ». Et Arkéa s’y oppose.

Les deux parties tirent de ce verdict deux conclusions totalement opposées. Arkéa estime « que la CNCM conserve ainsi son statut d’association » puisque le changement de statut ne peut se faire sans son accord. C’est un son de cloche évidemment bien différent pour la CNCM qui se félicite de pouvoir « modifier les statuts et procéder à cette transformation ». L’organe central convoquera prochainement une assemblée générale pour en discuter.

Qu’en pensent les autorités ? Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, souhaite que cette crise se résolve « par accord et pas par déclaration unilatérale ». Dans des propos recueillis ce 25 janvier par Le Télégramme, Jean-Pierre Denis, Président d’Arkéa et du Crédit Mutuel de Bretagne, précisait avoir « des contacts réguliers avec les autorités bancaires françaises et européennes » dans une « démarche lancée en toute transparence ». L’ancien gouverneur Christian Noyer doit remettre rapidement un rapport pour étayer les différentes hypothèses d’une séparation.

Les conséquences d’une éventuelle scission

Toutefois, le scénario du divorce soulève aussitôt deux questions majeures : quel est le schéma juridique à instaurer ? Quelle situation prudentielle pour les deux nouvelles entités ? Sur le second point, Arkéa se montre rassurant, mettant en avant son ratio de solvabilité élevé (16,9 %) et un total de bilan de 125 milliards d’euros au 30 juin dernier.

L’établissement s’appuie sur une croissance validant sa stratégie (4,1 millions de sociétaires et de clients) autour de ses réseaux de banque de proximité, ses filiales, sa position dans la banque en ligne (Fortuneo) et ses services numériques (rachat de Pumpkin, prises de participation dans Younited, Linxo, MaSuccession, Fluo ou Grisbee).

Malgré tout, les agences de notation ne sont pas dupes. En 2016, Moody’s plaçait l’établissement sous perspective négative à cause de ses velléités de rupture avec la confédération nationale, qui, le cas échéant, lui couterait deux crans de notation. Ce 24 janvier, c’est S&P Global Rating qui mettait Arkéa en perspective négative, choix reflétant « la probabilité accrue d’une sortie ».

L’un des enjeux est également l’utilisation et la protection de la marque Crédit Mutuel, levier marketing essentiel auquel tient Arkéa. D’après le baromètre trimestriel Posternak/IFOP, le Crédit Mutuel possède le meilleur indice d’image vis-à-vis du public (63 %, +1 entre septembre et novembre 2017). Dans ce baromètre, elle devance CIC (55 %, +4)… sa filiale depuis 1998. D’ailleurs, en cas de séparation, la branche CIC Ouest pourrait concurrencer Arkéa sur ses terres, la règle dite de « territorialité » devenant caduque.



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