La néobanque Fidor, le sparadrap du groupe BPCE

La néobanque Fidor, le sparadrap du groupe BPCE

Le groupe BPCE acte le « caractère non stratégique de Fidor », aussitôt traduit dans les chiffres par une dépréciation de la valeur de la néobanque de 148 millions d'euros. Le groupe mutualiste veut se débarrasser rapidement de Fidor, jamais lancée en France.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 16 Mai 2019

Fidor, l

Fidor, l’erreur de casting

La néobanque allemande a été rachetée en 2016 par le groupe BPCE. A l’époque, l’ancien patron, François Pérol, mise sur cette Fintech pour prendre position dans le secteur en plein boom de la banque mobile. Coût de l’opération : 150 millions d’euros. Une somme à laquelle il faut ajouter une recapitalisation à hauteur de 89 millions d’euros. Ce n’est pas tout. La néobanque signale une série de mauvais placements peu avantageux pour les dépôts des clients et leur rémunération.

Un membre du groupe mutualiste l’assurait : « Il y a eu des pertes sur des placements d'actif-passif (ALM) qu'il a fallu compenser, in fine cela a quasiment doublé le coût d'acquisition de la société ! ». Le document de référence de Fidor précisait dès 2016 que « BPCE s'est engagé à assurer une capitalisation suffisante à Fidor pour garantir ses pertes sur ses portefeuilles britanniques TCFC et Glasshouse Group à partir de 2017 et à hauteur de 84 millions d'euros. ». Se greffe en plus un obstacle culturel sur la concurrence interne que pourraient se livrer les différentes composantes de la BPCE.

Retour sur le contexte de la banque en ligne en 2016

A la manœuvre en 2016, François Pérol souhaite alors que l’établissement mutualiste rattrape son retard dans le numérique par rapport à ses concurrents qui avaient développé leur banque en ligne. La Société Générale a déjà acquis Boursorama Banque depuis 2014. La marque Hello bank ! est lancée par BNP Paribas en 2013, un an après l’émergence du concept du compte sans banque Nickel. Auparavant, le Crédit Mutuel Arkéa avait transformé Fortuneo en banque en ligne dès 2009. La même année, le Crédit Agricole mettait en selle la filiale BforBank. Et, depuis 2006, le Crédit Mutuel commercialise l’offre Monabanq.

En 2016, BPCE voit aussi la menace de néobanques étrangères (N26 et Revolut qui débarqueront en France en 2017) et de la mise en route de certains projets (Orange Bank, C-Zam de Carrefour Banque). L’acquisition de Fidor, plateforme technologique innovante adossée à un modèle de distribution en co-création avec sa communauté de clients, replace BPCE dans le jeu. Mais l’envol de la pépite restera confidentiel en Angleterre et en Allemagne, et inexistant dans l’hexagone. La peur en interne de voir les différentes composantes de la BCPE se cannibaliser signe la fin de l’aventure.

Les chantiers de restructuration du groupe BPCE

Laurent Mignon, nouveau président du directoire du groupe BPCE, décide de purger ce dossier. Résultat : une dépréciation de 148 millions d’euros de la valeur de la néobanque. Un chiffre qui a un impact dans les coûts de transformation et de restructuration de la banque (257 millions d’euros). Conséquence : les bénéfices nets du groupe bancaire mutualiste au premier trimestre 2019 sont plombés : 340 millions d’euros (-43,8 %). Pour Nicolas Namias, le directeur financier de BPCE, « les résultats du premier trimestre portent la marque de la performance soutenue des banques de proximité et de l'assurance, mais aussi celles de la transformation du groupe. ».

Le PNB de la banque de détail a progressé de 2,3 % avec des coûts de gestion qui doivent baisser au même rythme. Les coûts exceptionnels incluent l’absorption du Crédit Foncier, la transformation des réseaux en banques de détail, l’acquisition de 50,1 % d’Oney (banque du groupe Auchan) et l’accord noué avec Covéa pour récupérer l’activité d’assurance pour sa clientèle. Si Laurent Mignon réfute l’intérêt stratégique de lancer une nouvelle banque en ligne, il table sur la « forte accélération du digital au sein du groupe » avec comme creuset « une transformation de l’intérieur. ».

Quant au devenir de Fidor, le dirigeant déclare avoir « reçu plusieurs expressions d’intérêt ». La dépréciation de valeur de la néobanque n'est sans doute pas étrangère aux « discussions en cours avec des acheteurs potentiels. »



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