Néobanques : l'embarras du choix !

Néobanques : l'embarras du choix !

En annonçant le lancement de sa carte de paiement l'an prochain, Linxo rejoint la longue liste des néobanques déjà actives sur le marché hexagonal. Si certaines tentent d'occuper un marché de niche pour se différencier, d'autres exemples alertent sur les difficultés à venir.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 14 Juin 2019

Néobanques : l

La carte de paiement Linxo en temps réel en 2020

L'assistant financier sur mobile a annoncé, le 4 juin dernier, le futur lancement de sa première carte de paiement. L’objectif est d’offrir « la meilleure expérience temps réel avec son argent, quelle que soit votre banque ». La Fintech permettra donc à ses clients de régler leurs achats avec la carte Linxo, n’importe où dans le monde. Le service se veut parfaitement sécurisé et la transaction immédiatement visible sur son espace personnel.

Comme toute néobanque qui se respecte, l’expérience utilisateur est au cœur de la démarche, avec une « solution à 360° et en temps réel » comportant des fonctionnalités désormais répandues : outils de gestion budgétaire (catégorisation et suivi des dépenses, prévisionnel des comptes, état des lieux des produits d’épargne et de crédits, etc.), notifications d’alerte, paramétrage de la carte depuis l’application, paiement mobile, etc. Le moyen de paiement complète la fonction d’assistant financier tenue par Linxo (gestion de budget et agrégation de comptes bancaires).

Bruno Van Haetsdaele, co-fondateur de Linxo, dit s’appuyer sur les retours des clients pour adapter les services aux usages : « premièrement, l’exigence d’une très bonne expérience utilisateur, et, deuxièmement, l’avènement du temps réel comme un nouveau standard dans le paiement. ». La néobanque, qui recense 2,8 millions d’utilisateurs, ouvrira sa solution de paiement en 2020, la formule résultant à la fois d’un partenariat technologique avec Natixis Payments et Visa, et d’une stratégie de co-construction avec ses clients.

Le secteur des néobanques en France 

L’univers des néobanques n’est pas encore impitoyable mais risque de le devenir tant les acteurs se multiplient. Les banques mobiles qui ont réussi une percée sont venues de l’étranger en 2017. La néobanque allemande N26 a su séduire 700 000 utilisateurs, talonnée par la néobanque britannique Revolut et ses 560 000 clients. Le marché français est également occupé par la Fintech tricolore Morning (140 000 clients) ou encore la londonienne Monese (100 000 utilisateurs).

La France est le deuxième pays en termes d’adhésion aux néobanques (1,8 million d’utilisateurs), derrière la Royaume-Uni très en pointe (4,01 millions), mais loin devant l’Espagne (600 000), l’Allemagne (380 000), la Pologne (380 000) et l’Italie (330 000). L’engouement pour les banques mobiles attire également des acteurs majeurs comme Orange Bank qui a su conquérir 300 000 clients en un an et demi. Créée en novembre 2017, Orange Bank dénote toutefois par son profil hybride, puisque l’opérateur telecom propose l’ouverture d’un compte bancaire en ligne et en boutique.

Autre acteur à lancer sa banque mobile : la Banque Postale. L’établissement bancaire commercialisera cet été sa néobanque baptisée Ma French Bank, autour d’une offre payante (2 € / mois), avec également la possibilité d’ouvrir un compte dans certaines agences postales. Elle rejoint le contingent des comptes mobiles payants des grands groupes bancaires comme Eko by CA du Crédit Agricole, Enjoy de BPCE ou Essentiel de LCL.

Rappelons aussi la vive concurrence des banques en ligne, moins chères et bien plus complètes en termes de produits d’équipement. Le leader Boursorama Banque (1,8 million de clients) adopte par exemple une stratégie commerciale agressive, à l’image de sa nouvelle offre Ultim (carte Visa Premier gratuite). Enfin, les comptes sans banque C-Zam (130 000 comptes activés pour la marque de Carrefour Banque) et surtout Nickel (1,3 million de comptes couverts chez le réseau de buralistes) séduisent notamment d’autres catégories de la population (employés, demandeurs d’emplois, personnes aux revenus irréguliers).

De Fintech à néobanque, il n'y a qu'un pas

A comparer les néobanques, certaines choisissent justement de cibler leur offre sur un segment précis du public à l’image de Holvi, Fintech finlandaise rachetée en 2016 par la banque espagnole BBVA. Axée sur les petites entreprises et les travailleurs indépendants (gestion de note de frais, création et envoi des factures, catégorisation des dépenses), Holvi débarque en France en 2019 et chasse sur les terres des Fintechs françaises Qonto (40 000 clients) et Shine (30 000 clients), ainsi que de la franco-belge Anytime (100 000 clients).

A la fin de l’année 2018, c’est la banque 100 % mobile Bunq, venue des Pays-Bas, qui investissait le marché français. Son fondateur Ali Niknam se singularise par sa vision d’une banque bâtie autour du bonheur de ses clients. La néobanque Bunq lance d’ailleurs sa Travel Card, une carte bancaire d’entrée de gamme destinée aux voyageurs incluant la gratuité des opérations en devises à l’étranger. Quelques mois plus tôt, en février 2018, c’est Ditto Bank, néobanque française, qui proposait son compte multidevises dédié aux voyageurs d’affaires et aux expatriés.

Les derniers concurrents en lice s'intéressent aux adolescents, surfant sur la vague de l’éducation financière et des outils pédagogiques afin d’initier les plus jeunes à la gestion de leur argent. C’est le cas de Pixpay qui cherche à révolutionner la banque pour ados, en s’adressant aux 10-18 ans, les parents gardant le contrôle des mouvements du compte bancaire souscrit. Sur ce marché de niche amené à grossir, se positionnent d’autres néobanques telles que Xaalys (12-17 ans), plus orientée sur la gamification et les contenus éducatifs, ou Kard qui veut créer la première banque mobile de la génération Z (12-25 ans).

Néobanques : les premiers signaux d’alerte

Tout n’est pas rose non plus dans l’univers en ébullition des néobanques comme l’illustre le cas de Hush, dont le fondateur s’est volatilisé depuis septembre dernier suite à l’échec d’une levée de fonds, entrainant le non paiement de ses prestataires. Ce cas de figure n’est pas sans rappeler les déboires de Morning. Fin 2016, l’établissement de paiement avait vu son agrément logiquement suspendu suite à la ponction de 500 000 euros sur son compte de cantonnement. Morning sera ensuite sauvée en étant rachetée par la banque Edel et la Maif.

Plus médiatiques, les néobanques pionnières, Revolut et N26, ne sont pas épargnées par les régulateurs qui scrutent attentivement leur fonctionnement. Ainsi, depuis mars dernier, Revolut est soupçonnée d’appliquer des conditions de travail toxiques et de manquer de vigilance sur le blanchiment d’argent. Outre-Rhin, le régulateur allemand (BaFin) met en garde N26 contre l’insuffisance de personnels compétents face à l’augmentation des comptes ouverts. Le risque : un manquement aux questions de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme.

Au cours de ce mois de juin, ce sont les dysfonctionnements techniques qui ont émaillé la vie des Fintechs clientes de Treezor (Qonto, Shine, Lydia), fournisseur de micro-services bancaires. Ces problèmes informatiques rencontrés par la filiale de La Société Générale révèlent la dépendance de certaines néobanques à un seul acteur officiant sur le marché en France. Ce panorama évolue toutefois avec la création de Xpollens, associant Natixis Payments et Visa, qui délivrera des briques de paiement en marque blanche…avec Linxo comme client.

De manière générale, les organismes régulateurs comme les experts s’interrogent sur la pérennité du modèle des néobanques, d'autant que les géants du web lorgnent sur plusieurs services bancaires à commencer par le paiement. Par ailleurs, les banques en ligne, pourtant plus anciennes et adossées aux grands établissements bancaires, continuent d’afficher chaque année des déficits. Alors, y-a-t-il encore une place pour ces nouvelles banques mobiles ? Le groupe BPCE fait le pari que non, en actant le fait de ne pas lancer Fidor Bank en France, pourtant rachetée, en juillet 2016, pour 142 millions d’euros.



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