Conquête clients : l'insatiable frénésie des néobanques

Conquête clients : l'insatiable frénésie des néobanques

N26 est la première banque mobile à franchir le cap du million de clients en France, ce qui représente un quart de son portefeuille. Au concours, Revolut la devance avec 6 millions de clients en Europe et en Australie. Un rythme de croissance effréné.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 17 Octobre 2019

N26 passe la barre du million de clients en France

L’annonce du franchissement du seuil du million de clients a été relayée le 10 octobre par N26. Pour Jérémie Rosselli, son Directeur général sur le marché hexagonal, « plus qu’un objectif, c’est une nouvelle étape de notre croissance qui prouve que l’expérience bancaire que nous proposons répond aux besoins des clients et correspond à leurs modes de vie. Notre ambition est claire : devenir la première banque digitale en France ». Le pouvoir d’attractions, sans les ficelles de communication des banques en ligne, est plus que performant : N26 a décuplé son portefeuille client en deux ans. Et l’accélération perdure puisque, entre janvier et septembre 2019, la néobanque allemande a gagné 400 000 clients (net de fermeture), soit un rythme de 1480 clients par jour !

L’occasion pour N26 d’évoquer le profil de sa clientèle. En termes d’âge, les plus de 35 ans représentent 38 %, les 25-35 ans 37 % et les 18-25 ans 25 %. La stratégie pour séduire les Millennials, objectif initialement affiché, semble fonctionner. Le nombre moyen de transactions réalisées chaque mois par les clients s’établit à 19, pour un volume moyen de transactions mensuelles par client de 1020 euros. Grâce à la fonctionnalité de la catégorisation des transactions, N26 dévoile que les dépenses moyennes se font dans l’alimentaire (26 %). Viennent ensuite les voyages (17 %), les transports (15 %), le shopping (14 %) et, à un degré moindre, les dépenses professionnelles (6 %), le bricolage et les travaux (4 %), puis les loisirs (3 %).

Si la France est un marché important sur le Vieux-Continent, les ambitions de la néobanque berlinoise sont évidemment bien plus grandes. Son objectif consiste à repenser la banque du 21e siècle en rendant ses offres et ses services plus simples, plus rapides et plus modernes. Afin d’assouvir son appétit, N26 a déjà levé plus de 670 millions de dollars, dont 470 millions cet été. Son patron, Valentin Stalf, a déclaré au Financial Times vouloir accéder à la cotation boursière « d’ici trois à cinq ans ». Valorisée à 3,5 milliards de dollars, la banque mobile, qui veut rester indépendante, investit d’ores et déjà 26 pays dont les États-Unis ou la Suisse. A moyen terme, N26 espère conquérir 100 millions de clients dans le monde, un score que ne renierait pas sa concurrente Revolut.

Revolut veut 12 millions de clients fin 2021

Autre banque mobile aux dents longues, la britannique Revolut se fixe pour objectif à court terme 12 millions de clients d’ici 2021. Actuellement, la néobanque revendique un portefeuille de 6 millions d’utilisateurs après avoir déployé ses activités dans toute l’Europe ainsi qu’en Australie. Aux 32 marchés nationaux investis, s’ajouteront 24 terrains d'investigation à la fin de l'année 2019 , dont les États-Unis, le Japon, Singapour, le Brésil et la Russie. La fintech dirigée par Nikolay Storonsky ne cesse de vouloir innover comme l’accès à certaines cryptomonnaies. Pour soutenir cette expansion, Revolut vient de nouer un accord avec Visa et compte engager 3500 collaborateurs. Le CEO de la néobanque (pas encore rentable) a indiqué à Reuters vouloir doubler, voire tripler son nombre de clients en 2020.

Cette course haletante à l’acquisition clients n’est pas illogique, car les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux atouts des banques en ligne (coût, instantanéité, fonctionnalité, praticité, mobilité, autonomie) à mesure que l’essor des smartphones toujours plus performants démocratise leur usage. Ainsi, Pierre Labarraque, directeur du département Banque de l’Institut CSA, qui vient de publier son Observatoire des banques en ligne et Néo-banques, relate : « Le nombre de clients choisissant de faire d’une banque en ligne, la banque qu’ils utilisent le plus souvent ou dans laquelle ils domicilient leur salaire, augmente d’environ 2 points par an. Il y a deux ans, ils n’étaient que 40%. C’est le signe d’un renforcement de la relation entre les clients et leur banque en ligne ».

Frais bancaires à l’étranger, la bataille fait rage

L’appétit des banques en ligne est tout autant aiguisé. Présentes depuis plus longtemps sur le marché, ces filiales des grands groupes bancaires ont l’avantage de proposer un éventail de produits bancaires et assurantiels plus important. Logiquement, l’Observatoire des banques en ligne et Néo-banques note que les clients des banques en ligne en font plus aisément leur banque principale comparativement aux néobanques, plutôt reléguées à servir de compte bancaire secondaire pratique notamment pour voyager. Justement, la gratuité des frais bancaires à l’étranger est le nouveau sillon exploité par les banques en ligne. Boursorama a lancé les hostilités en juin dernier en commercialisant sa carte gratuite Ultim sans condition de revenu, rejointe ce mois-ci par Fortuneo et son offre Fosfo. La filiale du Crédit Mutuel Arkéa élargit d’ailleurs la gratuité des opérations en devises à l’ensemble de ces offres, une première !

Pourtant, les stratégies des deux banques en ligne ne sont pas identiques. Boursorama Banque fonce sur la conquête clients, alors que Fortuneo (450 000 clients en Europe) plaide pour le qualitatif plus que le quantitatif. Traçant sa route, la filiale de la Société Générale vient de franchir le cap des 2 millions de clients en septembre, avec un an d’avance sur les temps de passage prévus. Avec l’ambition d’atteindre 3 millions de clients fin 2020, Boursorama peut s’appuyer sur le succès de son offre Ultim : 125 000 demandes en trois mois. Comparativement, Nickel (1,3 million de comptes) a convaincu 91 000 souscripteurs au premier trimestre 2019, et Orange Bank 72 000 en un semestre (320 000 clients fin juin 2019). Comme la néobanque Max (Crédit Mutuel Arkéa), Boursorama et Fortuneo adoptent clairement un produit d’appel dédié aux voyageurs actifs, aux revenus plutôt élevés.

Les banques en ligne viennent donc défier frontalement les néobanques comme N26 ou Revolut, dont la gratuité des frais bancaires à l’étranger n’est possible qu’en souscrivant leur offre payante (8 à 10 euros par mois). Une offre payante parfois liée à une durée d’engagement, incluant possiblement des plafonnements de retrait.



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