Assurance Vie : les épargnants en colère

Assurance Vie : les épargnants en colère

Alors que les assureurs vie ont appelé l'exécutif à prendre un arrêté pour inclure dans leurs fonds propres leur provision pour participation aux excédents, les associations d'épargnants s'offusquent de cette opération visant à préempter un argent issu du produit financier des placements de l'assurance-vie.
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Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 10 Décembre 2019

Assurance Vie : les épargnants en colère

Les assureurs vie veulent plus de souplesse

Dans un contexte de taux obligataires bas voire négatifs, c’est toute la logique de l’assurance vie (capital garanti, liquidités des fonds) qui vacille. Après avoir alerté l’opinion et averti leurs clients que les taux de rendement servis des fonds euros en 2019 seraient à la baisse, les assureurs mutualistes s’adressent au gouvernement avec deux mesures en tête : la prise en compte des réserves de provision pour participation aux excédents (PPE) dans le calcul de leurs fonds propres, et une plus grande flexibilité du ratio de solvabilité. La première mesure permettrait de lisser les rendements et la seconde de ne pas se retrouver en défaut de solvabilité (normes Solvabilité II).

Alléger les exigences en matière de solvabilité

Les compagnies d’assurance espèrent un arrêté de la part du gouvernement pour leur redonner de l’oxygène comme c’est le cas en Allemagne. Pascal Demurger, directeur général de la MAIF met l’accent sur ce « paradoxe où, en effet, une projection en solvabilité II peut éventuellement suggérer un défaut de solvabilité, alors qu'en réalité, la situation financière est bonne et durablement bonne ». Cette réglementation a déjà obligé certains assureurs vie à faire appel aux actionnaires ou aux marchés pour renforcer leurs fonds propres : recapitalisation pour Suravenir (540 millions d’euros), émission de dette pour AG2R La Mondiale (500 millions d’euros).

Les associations d’épargnants mécontentes

Ces demandes des assureurs ont déclenché une vive réaction de la Faider (fédération d’associations d’épargnants en France). Se confiant aux Echos, son vice-président, Jean Berthon, souligne : « Cette façon de vouloir faire main basse sur la PPE est totalement extravagante car c'est l'argent qui provient du produit financier des placements de l'assurance-vie. Il doit être reventilé entre une rémunération immédiate du fonds en euros ou alors reversé aux épargnants dans un délai maximum de huit ans ». Théoriquement, assimiler ces réserves à des fonds propres signifie, qu’en cas de faillite hypothétique de l’assureur, tous les fonds seraient engloutis.

Une simple mesure technique pour les assureurs   

Thierry Martel, le président de l'Association des Assureurs Mutualistes (AAM), parle pourtant d’une simple mesure technique, arguant qu’il « ne faut pas affoler les Français. Aujourd’hui, il n’y a aucun risque de liquidité sur leur épargne ». Même propos tenus sur BFM Business par Philippe Brassac, directeur général de Crédit Agricole SA, qui parle de mesure « technique qui ne change rien pour l’épargnant » et qui rappelle que la PPE « représente au Crédit Agricole quatre ou cinq années d’avance de rémunération des épargnants » en concluant qu’il « serait quand même opportun de considérer cela comme des fonds propres ».

Unités de compte, fonds eurocroissance, PER : les alternatives aux fonds en euros

Reste que parfois les taux négatifs n’expliquent pas tout. Pour Cyrille Chartier Kastler du cabinet Facts & Figures, certaines « maisons mère ont procédé à des remontées massives de dividendes au point que leurs filiales d'assurance-vie se retrouvent sous-capitalisées et acculées à cet artifice des PPE ». La Faider compte donc sur les autorités de contrôle pour refuser la requête des assureurs. Rappelons que la France dénombre 37 millions de souscripteurs d’assurances-vie, dont la grande majorité en fonds euros à capital garanti, pour un encours global de 1700 milliards d’euros. Le gouvernement cherche donc à flécher l’épargne vers les unités de compte afin de contribuer au développement de l’activité économique via les nouveaux fonds eurocroissance et le plan épargne retraite (PER).

Assurance vie fonds euros 2019 : les premiers résultats à la baisse

Dans le même temps, les premiers résultats tombent. La rémunération nette de frais et sans bonification du fonds euros de Swiss Life passe de 1,50% à 1% en 2019. Même score pour Generali (contre 1,75% en 2018) tandis que le taux moyen servi par Allianz France s’établit à 1,20% (contre 1,70% en 2018). La filiale française de l’assureur allemand compte d’ailleurs refuser les nouveaux contrats à 100% en fonds en euros, et élargir l’offre avec de nouvelles unités de compte. Explicite, le PDG, Jacques Richier indique que « si nous devions sacrifier quelque chose avec l’assurance vie, ce serait la liquidité. S’il faut être punitif à ce sujet, nous le serons ».

 



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