JPMorgan déploie son appli mobile bancaire Chase au Royaume-Uni

JPMorgan déploie son appli mobile bancaire Chase au Royaume-Uni

Le géant bancaire JPMorgan Chase confirme les rumeurs du lancement de sa marque au Royaume-Uni, sous la forme d'une application mobile. C'est la première expansion internationale de la banque grand public, en 222 ans d'histoire. Retour sur un « très gros engagement stratégique ».
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 23 Septembre 2021

Appli mobile bancaire Chase

La banque numérique comme porte d’entrée à Londres

La société JPMorgan Chase va proposer ses services et produits bancaires en ligne, au marché britannique, dès la fin du mois de septembre. Au lieu de s’implanter par une présence physique et un réseau de succursales, le géant new-yorkais fait le pari du tout mobile. Interrogé par le Financial Times, Sanoke Viswanathan, PDG de la division internationale des consommateurs de JPMorgan, indique que l’arrivée de la banque au Royaume-Uni était un « très gros engagement stratégique (…) Nous allons dépenser des centaines de millions avant d’atteindre le seuil de rentabilité et d’arriver à un endroit où il s’agit d’une entreprise durable, et nous ne sommes pas pressés ».

La banque a d’ores et déjà embauché 400 employés pour distribuer son offre basée sur des comptes chèques et un programme de récompenses. Le catalogue de produits bancaires devrait rapidement s’enrichir, autour de solutions de prêts personnels, d’investissements et d’hypothèques. Cette annonce officialise les bruits de couloir colportés par Sky News, expliquant l’intention de JPMorgan, de lancer sa banque numérique de détail, sous la marque Chase, au cours du premier trimestre 2021.

JPMorgan Chase retrouve Goldman Sachs sur un marché encombré

En janvier dernier, Gordon Smith, directeur général des services bancaires aux particuliers et aux collectivités de la société, expliquait que le géant bancaire désirait fournir aux particuliers un nouveau choix bancaire, « fondé sur les capacités importantes de JP Morgan Chase ». Côté marketing, le choix de la marque Chase interroge tout de même David Bannister, analyste en chef chez Bloor Research, qui se déclare « un peu surpris » suite à l’utilisation de la marque Chase, « qui n’est pas très connue ici, sauf si vous avez plus de 50 ans. »

D’autant que le secteur bancaire est déjà bien occupé par les grands groupes HSBC, Barclays, Lloyds et NatWest. Sans compter la présence de solides Fintechs comme Monzo, Revolut et Starling qui, profitant d’une réglementation avantageuse, se taillent une part du gâteau (plus de 16 millions de clients à elles trois). Mais ce n’est pas tout. Le marché britannique accueille aussi, depuis 2018, la banque en ligne de Goldman Sachs, baptisée Marcus.

L’exemple de Goldman Sachs avec sa néobanque Marcus

La banque en ligne Marcus démontre la difficulté de la tâche, puisque la banque a perdu 1,3 milliard de dollars depuis son arrivée outre-Manche. En cause, les frais conséquents de développement, de l’espace de stockage dans le cloud et du recrutement. S’ajoute l’injonction réglementaire du pays qui impose la séparation entre les flux liés aux activités d’investissement, et les dépôts des particuliers et des entreprises.

Ce ringfencing s’élève à 25 milliards de livres pour Marcus. Or, en séduisant déjà 500 000 clients, la néobanque enregistre 21 milliards de livres d’encours d’épargne. Le seuil se rapprochant dangereusement, Marcus a coupé son offre de comptes d’épargne à ses nouveaux clients, pour ne pas devoir créer une nouvelle identité juridique.

JPMorgan sait les obstacles à surmonter, après avoir connu un échec avec sa banque mobile Finn by Chase. Destinée aux Millennials et active aux États-Unis entre octobre 2017 et août 2019, la néobanque a pâti d’une offre trop peu différenciante, à l’exception des frais de tenue de compte. Toutefois, Finn a plutôt agi comme un ballon d’essai. Les fonctionnalités les plus appréciées par les clients ont été rapatriées sur la principale appli Chase, qui, elle, n’a pas subi de préjudices en matière de réputation.

Le secteur bancaire, entre Brexit et pandémie

Le lancement de Chase survient dans un environnement particulier. La pandémie a dynamisé la numérisation de l’offre bancaire. JPMorgan enregistre d’ailleurs 50 millions de clients numériques, dont 34,4 millions exclusivement sur le mobile via l’application bancaire. Le géant new-yorkais affiche 700 milliards de dollars de dépôts pour 1,5 million de comptes bancaires en ligne.

Malgré ce regard porté sur le numérique, JPMorgan mise toujours sur son réseau d’agences physiques. Aux États-Unis, le groupe bancaire compte atteindre 93 % de la population d’ici à 2022.

Autre élément dont il faut tenir compte : le Brexit qui ne favorise pas la stabilité économique. Pour le PDG de la Fintech 11 :FS, David Brear, « le Royaume-Uni n’est pas étranger aux nouveaux concepts de banques concurrençant les opérateurs historiques qui vont et viennent, Bo de Natwest étant fermé moins de 6 mois après son ouverture l’année dernière. Il sera intéressant de voir ce qu’ils [JP Morgan NDLR] ont appris de l’échec de Finn et si oui ou non ils ont résolu ces leçons ».

JPMorgan à la conquête de l’Europe

Le lancement de Chase sur le sol britannique s’accompagne d’investissements, avec l’acquisition du gestionnaire de fortune en ligne, Nutmeg, et de la plateforme d’investissement éthique californienne, OpenInvest. JPMorgan a également signé un accord stratégique de prise de participation majoritaire (75 %) dans l’unité de paiement en ligne Volkswagen Payments.

Accessible dans 32 pays, l’application du constructeur automobile commercialise des services financiers, comme l’achat et le leasing de véhicules, le paiement de carburant, de parking, de recharges d’électricité, d’abonnements aux assurances, ou de distribution de contenus de divertissement dans les voitures. L’objectif partagé avec Volkswagen est le développement d’un service de paiement embarqué et connecté.

Située au Luxembourg, Volkswagen Payments participe au déploiement de JPMorgan en Europe. Et la France n’est pas exclue du jeu, puisque Paris devient le premier hub du géant bancaire en Europe, Brexit oblige. D’ici 2022, l’établissement va y regrouper près de 800 salariés, soit un niveau jamais atteint pour une banque américaine.

Le PDG, Jamie Dimon, signalait, en juin dernier, lors du sommet « Choisissez la France », l’attractivité parisienne : « Les impôts ont baissé, il y a des écoles internationales, un réservoir de talents, et les gens adorent la qualité de vie à Paris ». D’après le cabinet EY, ce sont près de 7500 emplois financiers et un milliard de livres d’actifs, qui ont basculé de Londres vers l’Union européenne.



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