Crédit immobilier : taux d'usure, révélateur de tensions entre banques et courtiers

Crédit immobilier : taux d'usure, révélateur de tensions entre banques et courtiers

La remontée des taux directeurs des banques centrales entraîne la hausse des taux d'emprunt immobilier. De quoi compliquer l'accès au financement pour l'achat de son logement. Les courtiers dénoncent aussi le plafond du taux d'usure trop bas qui bloque les demandes de prêt. Explications.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 12 Septembre 2022

Taux d

Pas de chute de production de crédits immobiliers

La hausse des taux directeurs des banques centrales se répercute sur le taux d’emprunt immobilier pour les entreprises et les particuliers. Est-ce un présage du blocage de la production de crédits ? Selon les dernières données publiées par la Banque de France, l’environnement reste dans la norme.

L’encours des crédits a progressé de 6,6 % en juillet, les emprunteurs ayant anticipé justement un futur relèvement des taux. La production atteint 21,8 milliards d’euros, proche de la moyenne sur cinq ans (20,3 milliards d’euros).

Oui, l’institution note une augmentation du taux du crédit immobilier (1,45 % en juillet contre 1,35 % le mois précédent). Toutefois, ces niveaux demeurent toujours bas, comparativement à la moyenne de 2,7 % affichée sur les quinze dernières années. Alors, pourquoi les courtiers s’inquiètent-ils d’une hausse des refus de dossiers de demande de prêt immobilier ?

Mode de calcul du taux d’usure remis en cause ?

Le point d’achoppement entre les courtiers et les banques concerne le taux d’usure. C’est le taux annuel effectif global (TAEG) au-delà duquel les établissements prêteurs n’ont plus le droit de faire crédit.

Rappelons que le TAEG inclut le taux d’intérêt, l’assurance emprunteur, les frais de garantie et les frais de dossier. Le calcul du taux d’usure est effectué par la Banque de France, en tenant compte des taux effectifs moyens appliqués par les sociétés de crédits, rehaussés d’un tiers.

Actuellement, le taux d’usure pour un prêt à taux fixe sur 20 ans est à 2,57 %. Sa fonction est d’éviter le surendettement des ménages, même si des effets de bord se dévoilent en écartant des profils d’emprunteur de l’accès au crédit immobilier. En effet, le rythme actuel de la hausse des taux d’intérêt et le poids de l’assurance emprunteur peuvent vite faire atteindre ce plafond. C’est d’ailleurs la cause principale des refus.

Des courtiers court-circuités par les banques

Dans une enquête très médiatisée, menée par Opinion System pour les six associations professionnelles d’Intermédiaire en opérations de banque et en services de paiement (IOBSP), près de 35 % des refus proviendraient d’un dépassement du taux d’usure. Les autres critères sont la clôture des services de prescription (14,89 %) et le refus de prise en charge des dossiers apportés par les courtiers (12,25 %).

En réalité, cette communication autour du taux d’usure trop élevé serait plus un moyen de mettre la pression sur les établissements bancaires qui travaillent de moins en moins avec les intermédiaires. Toujours à la recherche de marges financières sur la vente des crédits, les banques ont tendance à stopper leur collaboration, supprimant au passage la commission versée aux apporteurs d’affaires. Cette friture sur la ligne est à l’origine des deux sons de cloche différents entre des courtiers alarmistes et la Banque de France qui n’observe ni chute brutale de la production de crédits ni sortie du marché des primo-accédants ou des ménages modestes.

Taux d’usure : qui est concerné par ce plafond ?

La Banque de France dit observer avec attention l’évolution de la situation, avant de possiblement réajuster le taux d’usure. Mécaniquement, il le sera au 1e octobre prochain. En attendant, certains emprunteurs sont réellement concernés par ce plafond qui les empêche d’accéder au crédit immobilier.

C’est particulièrement le cas pour les particuliers qui voient le coût de leur assurance emprunteur croître avec l’âge. Ce que confirme Cécile Roquelaure, directrice des études pour le courtier Empruntis : « À profil égal, une personne de plus de 45 ans peut avoir une assurance emprunteur jusqu’à 4 fois plus chère qu’une autre âgée de 30 ans ». Heureusement, plusieurs solutions existent pour tenter de contourner l’obstacle.

Refus de prêt à cause du taux d’usure : les parades

L’emprunteur doit faire jouer la concurrence en activant la délégation d’assurances ou négocier avec sa banque. En cas d’impossibilité, un couple peut moduler sa quotité d’assurance en l’abaissant de 100 % à 75 %. Cela signifie que le conjoint survivant devra continuer de rembourser les 25 % restants. La souscription d’une prévoyance additionnelle peut ensuite gommer ce reste à charge.

Parmi les autres options, les professionnels citent le recours à des prêts variables capés à 1 %. Le taux ne peut fluctuer à la baisse ou à la hausse de plus de 1 %, limitant ainsi les risques de marché. Autre opportunité : le prêt multilignes permet d’emprunter une partie du financement sur 10 ans et l’autre sur 20 ans, diluant ainsi l’effort. Enfin, l’emprunt via la création d’une SCI familiale peut s’avérer une solution efficace pour faire passer des dossiers difficiles.



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