L'avenir du PTZ en question

L'avenir du PTZ en question

« La mission recommande de ne pas prolonger le PTZ au-delà du terme prévu » : telle est la conclusion du rapport remis au gouvernement, rédigé par l'Inspection générale des finances (IGF) et le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD). Décryptage.
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Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 15 Novembre 2019

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PTZ : effet déclencheur ou effet d’aubaine ?

La question du prolongement après 2021 du prêt à taux zéro (PTZ) se pose logiquement dans le contexte de taux bas actuel. Un rapport commandé par l’exécutif indique clairement que cet outil n’est plus suffisamment incitatif, d’autant qu’il a tendance à orienter les ménages vers l’achat d’un bien immobilier neuf.

Créé en 1995, le prêt à taux zéro profite aux primo-accédants appartenant aux classes sociales modeste et moyenne. Sauf que le rapport explique que, dans neuf cas sur dix, le PTZ n’est en rien décisif dans le choix définitif de l'acte d’achat du logement : « Sur les 1,9 milliard d'euros que coûtent aux finances publiques les PTZ accordés en 2017, 1,6 milliard d'euros sont dépourvus d'effet décisif ».

En observant par zones géographiques, l’effet déclencheur du PTZ dans l’acquisition d’un bien immobilier neuf intervient pour un ménage sur quatre en région parisienne et sur la Côte d’Azur (zones dites tendues). Parallèlement, cet effet n’affleure qu’à 5% seulement dans les zones rurales, qui se caractérisent par des prix du marché de l’immobilier bien plus bas.

Le périmètre mouvant du prêt à taux zéro

Le PTZ s’adresse aux ménages n’étant pas propriétaires d’une résidence principale depuis deux ans sauf exceptions (situation de handicap de l’emprunteur, logement précédent rendu inhabitable suite à une catastrophe technologique ou naturelle). Une condition de plafond de ressources existe aussi en fonction de la zone géographique. Cet outil concerne le marché neuf et le marché ancien sous réserve d’entreprendre des travaux dont le montant représente au minimum 25 % du coût de l’opération.

Divisé par deux en 2018 pour l’achat de logements neufs dans les zones détendues B2 et C, le PTZ demeure jusqu’à présent inchangé pour les zones tendues (A et B1) et pour l’achat de logements anciens (ceux des grandes agglomérations étant exclus du dispositif). Toutefois, sa suppression totale est programmée pour 2021, alors que l’exclusion des zones les moins tendues est prévue dès 2020.

Le montant du prêt gratuit varie entre 20 % et 40 % du coût total de l’achat (hors frais de notaire), avec un plafonnement selon les zones et le nombre de résidents. Le rapport indique que le prêt à taux zéro permet de réduire, en moyenne, la mensualité de 1,4 % du revenu. Parmi les arguments des défenseurs du PTZ, son remboursement différé possible (5, 10 ou 15 ans après sa souscription) qui offre l’opportunité pour les ménages modestes d’amortir le coût de l’emprunt (étalé sur 10 à 15 ans).

Suppression du PTZ en 2021 : ping-pong argumentaire  

Les lobbyistes du secteur immobilier tentent actuellement d’infléchir le pouvoir législatif sur la suppression du PTZ dans les zones détendues, effective au 1er janvier 2020. Outre l’argument de la solvabilité des emprunteurs, les professionnels poussent à maintenir le PTZ sur le neuf dans les communes du programme Action Cœur de ville (dynamisation des centres des villes moyennes) et sur les territoires concernés par les programmes de rénovation urbaine.

Jacques Chanut, le président de la Fédération française du bâtiment (FFB) sort l’artillerie lourde pour interroger la cohérence politique de  l’exécutif : « Si le PTZ sur le neuf n'est pas reconduit dans les zones B2 et C, cela va déplacer toujours plus loin des bourgs la construction des maisons, au fin fond de la campagne, là où les terrains sont encore moins chers. Au moment où tout le monde s'égosille sur la fracture territoriale, cela ne ferait que l'accentuer ».

Le rapport est plus sceptique sur la contribution du PTZ à l’achat de logements neufs (44% des logements financés, 3 prêts sur 4). Or, les auteurs font le lien entre construction de logements neufs, d'une part, et artificialisation des sols et désertification des centres-villes, d'autre part. Des arguments retournés par la députée LREM Stéphanie Do, rapporteure pour avis de commission des affaires économiques, sur les crédits logements du PLF, qui renvoie l’artificialisation des sols au « droit de la construction, de l’urbanisme ou de la fiscalité ».

La députée plaide pour une prorogation, arguant que « la suppression du PTZ en zones dites détendues ne fait que diminuer la solvabilité des ménages, ce qui les incite à rechercher un foncier moins cher, en s’éloignant encore plus des zones d’habitation… contredisant finalement l’objectif de lutte contre l’artificialisation ». Le rapport de l’IGF et du CGEDD vise au contraire à stimuler l’achat de biens dans l’ancien avec travaux, en diminuant les effets d’aubaine et en ajustant mieux le périmètre des bénéficiaires.

Et après 2021 ? Le rapport évoque potentiellement la transformation du PTZ en prêt à taux négatif, en mécanisme similaire à l’APL accession, ou en subvention attribuée à l’acheteur.



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