FinTech : indépendantes ou pas ?

FinTech : indépendantes ou pas ?

Les Fintech sont plusieurs à vouloir s'implanter dans le secteur bancaire grâce à leurs services innovants. Mais si certains projets laissent entrevoir de réelles perspectives de développement, le rachat du Compte Nickel par BNP Paribas questionne sur leur liberté d'action et leur indépendance.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 13 Juin 2017

FinTech indépendantes ou pas

Compte Nickel ou Fidor : le rachat des néobanques

Instantanéité, expérience utilisateur, tarifs avantageux : les néobanques développent des services digitaux innovants pour séduire les usagers des banques traditionnelles. Mais nombre d’entre elles finissent par être rachetées par les mastodontes à l’instar de Simple récupérée par BBVA en 2014, Leetchi vendue au Crédit Mutuel Arkéa et plus récemment Compte Nickel tombé dans l'escarcelle de BNP Paribas. On peut également ajouté à cette liste l’alliance entre Fidor et BPCE ou le sauvetage de Morning par la Banque Edel, filiale bancaire du groupe E. Leclerc. Par ailleurs, les modèles de ces Fintech sont plus ou moins répliqués par d’autres entreprises, telles qu’Orange Bank ou Carrefour et son coffret C-Zam.

En réalité, la question de l’indépendance des néobanques revient à s’interroger sur leur viabilité et leurs intentions à moyen terme. Comme on le voit avec les banques en ligne, atteindre le seuil de rentabilité impose de séduire des millions de clients sur un laps de temps assez court et de financer le développement. Malgré leur agilité, des équipes restreintes et des frais structurels moindres, le besoin d’argent est impératif. L’exemple de Morning est à ce titre évocateur. Désireuse de lancer sa carte bancaire, la jeune pousse a commis une faute en utilisant les fonds cantonnés des clients pour financer l’opération auprès de MasterCard. Résultat : le rachat pur et simple de la néobanque par la Banque Edel. Et des belles idées du fondateur de Morning qui « voulait réveiller la banque »…ne sont plus grand-chose.

Alliance et partenariat : aveu d’échec ou stratégie ?

L’alliance entre des Fintech et des banques traditionnelles n’est pas illogique, même si les premières se targuent au départ de vouloir révolutionner le secteur. Le co-fondateur de Fidor, Matthias Kröner, exprime la difficulté d’évoluer dans un « métier très capitalistique », n’hésitant pas à évoquer les faiblesses de la néobanque avec « une structure du capital très fragmentée » et le « besoin de fonds propres ». Avec l’arrivée de BPCE comme actionnaire majoritaire, Fidor dispose « d’un partenaire solide et d’un socle d’actionnaire stable ». La banque a l’avantage de cerner le métier et ses contraintes, tout en se montrant moins pressée qu’un fonds de capital-risque. De même, cette solution s'avère moins aventureuse qu’une entrée en Bourse, généralement prématurée pour les néobanques.

Dans l’exemple du Compte Nickel, plusieurs contraintes conjuguées ont amené au rachat par BNP Paribas : pression des fonds actionnaires, difficultés techniques liées au succès et désir de certains fondateurs de se désengager. La banque s’offre ainsi un nouveau réseau de distribution d’envergure (les buralistes) ainsi qu’une base de 550 000 clients. Pour Hugues Le Bret, président et cofondateur du Compte Nickel, cette perte d’indépendance ne modifie pas sur le terrain le rôle de concurrent de BNP Paribas mais « apporte de la solidité. Ce qui rassure nos clients. ». D’autres se tournent vers l’étranger comme Younited Credit, spécialisé dans le prêt entre particuliers, qui s’est allié en 2016 avec la plateforme allemande Raisin, ou encore la néobanque allemande N26, désormais partenaire de TransferWise, focalisé sur le transfert d’argent à l’international.

FinTech : toujours autant d’initiatives

Les levées de fonds des Fintech se poursuivent, comme preuve d’un secteur toujours dynamique notamment en Europe. Le Vieux Continent s'offre un record avec 610 millions de dollars d’investissements en capital-risque (880 millions de dollars en tout via 89 opérations). Les plus remarquables sont signées iZettle qui propose un terminal de paiement pour cartes bancaires, sans abonnement mensuel ou autres frais fixes (175,2 millions de dollars), Atom Bank (103,6 millions de dollars), BillPay (64,7 millions de dollars), Raisin évoluant dans l’épargne en ligne (31,9 millions de dollars) et Solaris Bank, bank-as-service (28 millions de dollars). La France n’est pas en reste avec les 11 millions d’euros levés par Famoco, spécialiste des transactions sans contact, ou les 8,4 millions d’euros obtenus en augmentation de capital par l’agrégateur bancaire Bankin’. Ajoutons également la levée de fonds de 5 millions d’euros réalisée par Anytime en novembre 2016 ou celle de Qonto, en janvier 2017, pour 1,6 million d’euros.

Toutefois, la multiplication des projets suscite quelques interrogations. Philippe Tescher, associé chez Exton Consulting, assène : « Certaines néobanques se lancent sans véritable modèle économique, mais avec un outil technologique qui leur permet d’attirer de nombreux clients. C’est comme si elles étaient créées pour se faire racheter. ». Nicolas Debock, investisseur chez Balderton Capital, estime que « quelques-uns réussiront à rester indépendants en se focalisant sur une niche, par exemple (…) Pour cela, ils ont besoin d’investisseurs impliqués à long terme, prêts à investir beaucoup d’argent et à résister aux offres de rachat qui ne manqueront pas si le projet réussit. ».

Malgré les ambitions affichées, la volonté d’indépendance se heurte à la réalité d’un monde bancaire et financier qui requiert une base solide d’actionnaires. Bien qu’elles apportent des solutions disruptives, les néobanques sont des cibles pour des établissements traditionnels qui sont confrontés à une concurrence toujours plus accrue.

Pour aller plus loin

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