Offensive des GAFA dans le secteur bancaire : entre menaces et limites

Offensive des GAFA dans le secteur bancaire : entre menaces et limites

Le récent rapport rédigé par le Conseil de Stabilité Financière s'interroge sur les conséquences de l'arrivée des GAFA dans le secteur de la finance internationale. Entre fantasmes et réalité, la question des risques pesant sur la stabilité du système financier est passée au crible.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 20 Décembre 2019

Banque : l

L’implication des GAFA de plus en plus effective

Le 9 décembre dernier, le Conseil de Stabilité Financière (CSF), une entité issue du G20 qui réunit les vingt-six autorités financières de l’économie internationale (banques centrales, ministères), a rendu son rapport portant sur l’impact de l’arrivée des géants de la tech dans le secteur financier. Cette publication intitulée « BigTech dans la finance, évolution du marché et implications potentielles pour la stabilité financière » tente de lister les avantages et les inconvénients de ce mouvement qui commence à prendre de l’ampleur.

En peu de temps, les fameux GAFA ont investi le champ des services de paiement. Ainsi, Apple a lancé, aux Etats-Unis, sa carte de crédit Apple Card. Alors qu’elle annonçait les contours de son projet de cryptomonnaie Libra, l’entreprise Facebook commercialisait son porte-monnaie électronique Facebook Pay, afin de se positionner sur le social shopping, amené à exploser en 2020.

Toujours l’année prochaine, Google a prévu de mettre en place un compte courant, tandis qu’Amazon est très puissante dans le cloud computing utilisé par les banques, mais aussi via son système Prime, outil de fidélisation de sa clientèle.

Bienfaits et menaces des BigTech sur le système bancaire

Qu’en dit le CSF ? Parmi les aspects positifs, les autorités régulatrices s’accordent sur le fait que les géants des technologies ont obligé les acteurs traditionnels à se renouveler en termes d’innovations et d’efficacité. L’expérience utilisateur est devenue un élément stratégique pour séduire les prospects, notamment les jeunes générations.

On leur doit également une plus grande accessibilité aux services bancaires, en particulier dans les pays en voie de développement, ce qui contribue à favoriser l’inclusion bancaire. Autre point considéré comme positif : l’accès simplifié aux marchés financiers pour les PME.

En revanche, si l’innovation bouscule l’immobilisme et les positions de rente des banques traditionnelles, le CSF y décèle aussi une source de déstabilisation pour le système économique mondial. L’avantage du coût pour les clients provoque un effet négatif sur la rentabilité des banques, donc sur leur solvabilité, leur liquidité et les risques opérationnels. En miroir, le renforcement de la solidité des fonds propres imposé aux établissements financiers plombe leurs capacités à investir.

Une stratégie d’association avec les banques

Le G20 souligne également que la concentration des GAFA a des conséquences néfastes en termes de gestion des risques, tandis que leur main mise sur le cloud renvoie à la problématique de la dépendance des banques. Ce dernier point est illustré par la filiale d’Amazon, AWS, qui loue ses capacités informatiques aux entreprises. Une domination dans le cloud computing à peine contrebalancée par…Google et Microsoft

En outre, les autorités régulatrices s’inquiètent de l’instauration de cette nouvelle voie, véritable couloir de propagation d’une hypothétique crise financière. Par la distribution de services financiers, les géants de la tech ouvrent en effet les risques associés à une échelle plus large et plus massive.

Les instances préconisent une vigilance accrue et misent sur de nouvelles règles de régulation pour apporter des garanties. Or, les géants de la tech n’apprécient guère de voir leur périmètre d’actions être limité et surveillé. Pour preuve, les GAFA fonctionnent selon un modèle d’association avec les banques établies. Apple dispose d’un partenariat avec Goldman Sachs, Amazon est couplée avec JP Morgan Chase, et Google avec CitiGroup.

Secteur bancaire : les GAFA connaissent aussi des problèmes

Face à ces craintes, faut-il rappeler que tous les projets lancés dans le secteur bancaire par les géants de la tech ne rencontrent pas le succès escompté. Google a par exemple abandonné son comparateur d’assurances lancé en 2015, et voit son offre Google Pay tarder à séduire les utilisateurs. La question de la confiance des clients est également soulevée, avec l’image de Google et de Facebook fortement écornée par le scandale de la gestion des données personnelles. Un obstacle évident pour que les clients acceptent sans rechigner de leur livrer leurs données bancaires.

Autre écueil : la mise en suspens du projet de cryptomonnaie Libra de Facebook, suite au départ de nombreux partenaires (Visa, MasterCard, Paypal, etc.) et à la levée de boucliers des autorités régulatrices. De son côté, Apple pourrait être contrainte de casser le monopole d’Apple Pay sur le module NFC de l’iPhone (loi votée en Allemagne et discussions au niveau européen). Au même moment, outre-Atlantique, les algorithmes exploités par Apple Card pour l’allocation de crédits sont accusés de sexisme.

Enfin, le partenariat d’Amazon avec l’assureur Aviva pour distribuer des contrats d’assurance auto, lancé en France, en octobre 2018, n’a généré que 3 à 5% seulement des paiements en ligne sur la première année. Et déjà le mécanisme de souscription est remis en cause avec la mise en place, d’ici mars 2020, du dispositif d’authentification forte pour les transactions en ligne supérieures à 30 euros. Autrement dit : Amazon Pay ne sera plus compatible puisqu'il suffisait simplement de cliquer sur le wallet.



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