Morning : les raisons d'un échec

Morning : les raisons d'un échec

La néo-banque Morning cumule les écueils, entre injonction de l'ACPR, trésorerie négative, et conflit ouvert avec son principal actionnaire, la MAIF. Au point que sa survie est en jeu.
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Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 02 Janvier 2017

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Morning, de la success-story au naufrage ?

C’est en 2013 que la start-up toulousaine, Payname, est lancée par Éric Charpentier. Cette application de paiement vise à simplifier les déclarations et les paiements de services entre particuliers (ménage, bricolage, baby-sitting, etc.). Payname surfe sur son concept, enregistrant plusieurs levées de fonds : 300 000 €, en 2013, 500 000 € (crowdfunding), en 2014, et 5 millions d’euros, en 2015, 80 % de cette somme étant amenées par la MAIF.

Dans la foulée, l’ambitieuse jeune pousse démarre son projet de construction d’un campus, sur la commune de Saint-Elix le Château, dont le premier bâtiment de 600 m² ouvre le 3 juin 2016. Cette date marque un pivot de l’entreprise, rebaptisée Morning, et qui aspire à devenir une néo-banque. Mais, en septembre, les nuages s’amoncèlent, quand la MAIF, qui détient 38 % des parts, refuse de soutenir Morning dans sa volonté d’entrer en bourse, en 2017.

Stratégie jugée trop précipitée, l’assureur préconise plutôt l’ouverture du capital, à un opérateur solide, notamment une banque traditionnelle. Or, ce scénario ne convient aucunement au fondateur, car ce processus ferait fuir les nouveaux actionnaires, séduits uniquement par un projet de banque indépendante.

Morning vs MAIF : conséquences d’une divergence stratégique

En bloquant son investissement, la MAIF montre son désaccord avec Morning et suspend de fait les projets de la start-up : future levée de fonds de 15 millions d’euros, lancement d’une carte de paiement MasterCard, entrée en bourse. Eric Charpentier estime que 5 millions d’euros suffisent pour continuer l’activité Morning. Or, cette situation s’est dangereusement dégradée, le 1er décembre, lorsque l’ACPR a pris des mesures conservatoires, impliquant la suspension des services de la néobanque.

Le régulateur lui reproche de ne pas avoir établi « les diligences requises pour assurer la protection des fonds reçus de sa clientèle. ». En effet, en septembre dernier, faute de fonds propres disponibles, un prélèvement de 514 564 euros a été réalisé sur les dépôts des clients. Le but : apporter la garantie requise pour la concrétisation des cartes de paiement Morning. Cette manœuvre a immédiatement alerté l’ACPR, qui impose que cette opération se fasse sur les fonds propres. La correction devait être apportée au 1er décembre, correction impossible pour la fintech, dont la trésorerie est dans le rouge depuis le 17 novembre, et dont l’actionnaire principal ne souhaite plus mettre au pot.

Résultat : les 75 000 clients n’ont donc pour l’heure plus accès à leur dépôt, et le risque de défaillance plane au dessus de la tête des 50 collaborateurs de Morning. La conciliation de dernière minute entre la néobanque et la MAIF, accusée au passage de privilégier Nestor, son agrégateur de comptes bancaires, devrait toutefois permettre de prolonger l’espoir…quelques semaines de plus.
Trois projets de reprise sont actuellement sur la table des actionnaires. L’un d’entre eux est porté par Mutualize, établissement de paiement agrée par l’ACPR, qui détient notamment le journal en ligne FranceSoir. La décision devrait espérons-le rapidement débloquer la situation pour les 75 000 clients de la néobanque.



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