La Société Générale se réinvente

La Société Générale se réinvente

Après une décennie tumultueuse entachée par l'affaire Kerviel, la Société Générale puise dans la transformation numérique une voix pour se réinventer. Rapprochement avec l'écosytème digital, nouveau slogan et nouveau concept d'agences physiques "client centric", plan de formation : retour sur ce virage.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 07 Février 2019

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La Société Générale veut clore le chapitre Kerviel

L’affaire Kerviel colle à l’image de la Société Générale depuis 2008 et la perte record de 4,9 milliards d’euros subie suite aux agissements de l’ancien trader. Toutefois, l’horizon judiciaire s’éclaircit, laissant entrevoir une nouvelle ère. En septembre dernier, Jérôme Kerviel a vu la Cour de cassation refusé la demande de révision de son procès. Il reste donc condamné à trois ans de prison ferme et un million d’euros de dommages et intérêts à verser à la banque (contre 4,9 milliards d’euros initialement). Le 19 décembre 2018, un arrêté de la cour d’appel de Paris valide le licenciement pour faute grave du trader. Les magistrats précisent que « les éléments du dossier ne permettent pas d'établir que monsieur Kerviel a agi pour un autre motif que celui de poursuivre son intérêt personnel », tout en soulignant que ses agissements ont été facilités par « les carences du système du contrôle interne de la banque ».

Nouveau slogan « C’est vous l’avenir »

L’ancien trader est donc coupable mais pas entièrement responsable, une différence qui a des conséquences fiscales pour la Société Générale. En effet, la banque a profité du mécanisme de carry back qui autorise une société en déficit suite à la faute reconnue d’un de ses collaborateurs à convertir une part de ses pertes en créance sur le Trésor Public. La Société Générale a ainsi pu déduire 2,2 milliards d’euros de ses prélèvements en 2009 et 2010. Or, en reconnaissant les défaillances de la banque, le carry back n’a plus lieu d’être, Bercy étant toujours susceptible d’engager un redressement fiscal. Malgré tout, le volet judiciaire étant clos, la Société Générale aspire à se débarrasser de ce sparadrap. L’établissement lance d’ailleurs un nouveau slogan plein d’espoir « C’est vous l’avenir », qui succède au précédent « L’esprit d’équipe » mis en place justement après l’éclatement de l’affaire Kerviel pour remobiliser la cohésion interne du groupe.

L’agence de demain sera client centric

Ce nouvel élan se traduit parallèlement par la conception du nouveau modèle d’agence physique prôné par la banque de la Défense autour du concept de client centric. Conçu par le pôle architecture et retail du cabinet Lonsdale, la configuration des lieux s’adapte « en permanence pour faire vivre au client, sur tous nos marchés, la meilleure expérience bancaire en proximité et à distance, quel que soit le canal de son choix ». L’accueil expose les divers services « phygitaux, coaching d’accueil et borne digitale » tandis que le parcours client conduit au salon découverte « lieu de conversation informelle composé d’assises confortables et colorées » qui présente l’offre bancaire par le biais de bibliothèques. Le social wall affiche les réseaux sociaux et les informations de la banque, et des espaces dédiés confidentiels, baptisés studios et réservables en ligne, sont délimités par des parois translucides. Ce concept va être déployé dans une centaine d’agences à l’horizon 2020.

La transformation digitale de la Société Générale

Claire Calmejane, directrice de l’innovation de la banque, pilote le projet d’intensification des relations de la banque de la Défense avec l’écosystème des Fintech. L’idée : proposer des services innovants et des modèles commerciaux de rupture via le programme d’intrapreneuriat. Pour expérimenter des activités disruptives, la Société Générale s’appuie sur l’entité Société Générale Ventures, une structure d’investissement transverse dotée de 150 millions d’euros. Cette entité a servi au rachat de Lumo, Fintech, spécialisée dans le crowdfunding des énergies renouvelables, ou de Treezor, jeune pousse s’illustrant dans le domaine de l’open banking. D’autres opérations ont été réalisées comme l’investissement dans la solution de paiement mobile TagPay ou la prise de participation minoritaire dans la place de marché dédiée aux voitures d’occasion, Reezocar. Claire Calmejane indique avoir ciblé cinq secteurs : « la mobilité, l'identité et l'expérience immersive, la valorisation de la donnée, le travail de demain et l'e-santé. ».

Repenser aussi le métier de banquier

Outre la transformation numérique, la Société Générale se préoccupe de la plus-value du métier de conseillers bancaires. Pour Laurent Goutard, directeur de la banque de détail Société Générale en France : « en 2025, la majorité des clients ne seront pas à 100 % digitaux ». Il loue notamment l’opportunité offerte aux réseaux d’experts et milite pour le dispositif « Mon job 2020 », un plan qui accompagne les salariés dans leur montée en compétence. La restructuration du réseau concerne également la back-office avec six centres de traitement sur vingt qui sont en cours de fermeture. De plus, la Société Générale souhaite l’automatisation des process internes à hauteur de 80 % d’ici deux ans entre agences et back-office, là encore pour réduire les coûts structurels. La banque tranche donc dans ses effectifs : 3540 postes supprimés prévus entre 2016 et 2020.

Des doutes sur la tenue des objectifs financiers

La formation continue est au centre des stratégies puisque pour Laurent Goutard « dans cinq ans, il n’y aura plus de caisse en agence » et « trois quarts des collaborateurs vont changer de job » sur la même période. Le directeur de la banque de détail Société Générale en France estime qu’il y a « un peu moins d'opportunités avec l'aplatissement de la pyramide managériale et la suppression du nombre de niveaux hiérarchiques, des perspectives de carrière différentes, mais nous voulons maintenir l'ascenseur social. ». Reste que les marchés financiers doutent de la capacité de la SocGen à atteindre les objectifs de rentabilité et de solvabilité à tenir pour 2020. La publication des résultats trimestriels est attendue ce 07 février, un avertissement sur résultat lancé en janvier conduisant à un consensus sur le profit net trimestriel de la Banque de la Défense en recul de 16 % à 549 millions d’euros.



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