Frais bancaires : quand la gratuité pèse sur les plus fragiles

Frais bancaires : quand la gratuité pèse sur les plus fragiles

Le rapport annuel de l'Observatoire des tarifs bancaires montre que les banques ont respecté leurs engagements pris à la fin de l'année 2018. En revanche, certains frais d'incidents bancaires posent toujours souci, faisant supporter les revenus de banque de détail par les plus fragiles.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 11 Octobre 2019

Les foyers à revenus faibles, toujours plus fragiles

Pas de hausse des frais bancaires en 2019

Le rapport annuel 2019 de l’Observatoire des tarifs bancaires (OTF) du Comité consultatif du secteur financier (CCSF) a passé au crible les données tarifaires brutes de l’Extrait standard des frais bancaires issues des plaquettes en vigueur au 5 janvier 2019 de 101 banques de réseau et 8 banques en ligne. Ce large panel représente 98,02 % des parts de marché de comptes courants de particuliers à la fin de l’année 2018.

Quelles sont les conclusions ? L’OTB ne relève aucune hausse des tarifs en 2019 et enregistre même cinq tarifs en recul : les abonnements permettant de gérer les comptes internet, les produits offrant des alertes sur compte par SMS, les cartes de paiement à débit différé ou à autorisation systématique et les frais de mise en place des prélèvements. Par contre, les frais d’incidents, conséquences d’un chèque rejeté ou d’un virement refusé, restent problématique.

Des frais d’incidents bancaires élevés et parfois disparates

L’OTB note l’homogénéité des grilles tarifaires liée à l’encadrement législatif ou réglementaire imposé. Traduisons : les frais d’incidents bancaires se calent quasiment systématiquement sur le montant du plafond autorisé. Certains frais d’incident, tels que les lettres sur compte débiteur (0 à 24,40 euros) ou lettre d’information préalable (0 à 20 euros), affichent une plus grande dispersion, même si celle-ci s’en trouve limitée du fait de l’inclusion de ces frais dans le périmètre de l’offre dédiée aux clients fragiles.

En effet, plusieurs mesures ont permis de faire des progrès pour aider 3,5 millions de personnes en fragilité bancaire : création d’une offre spécifique fin 2018, gel des tarifs en 2019 et plafonnement des frais d’incidents à 25 euros par mois. La Banque de France précise que les deux dernières mesures ont permis de réinjecter 500 à 600 millions d’euros dans l’économie. Mais les frais d’incidents bancaires en France restent parmi les plus élevés au niveau européen.

Un système de solidarité inversée dissimulé ?

Répondant aux Echos, le Vice-président de la commission des Finances, Daniel Labaronne, souhaite abaisser le plafonnement global des frais d’incident de 20 à 5 euros par mois. Il fait le constat  « qu'aujourd'hui les frais d'incidents restent très élevés, et qu'en contrepartie, les simples frais d'usages restent modérés. Ainsi la gratuité de certains services aux plus aisés repose notamment sur les frais d'incident. ». Évidemment, le député tient compte des contraintes actuelles du secteur bancaire.

Autre député de la majorité, Philippe Chassaing précise : « L'objectif n'est pas de clouer les banques au pilori. Mais on doit pouvoir travailler en bonne intelligence pour définir des critères clairs et éviter d'accabler des populations les plus fragiles. Les banques ont les moyens d'agir, c'est aussi dans leur intérêt, pour leur image ». Et de s’atteler à déceler un éventuel processus de solidarité inversée « où ce sont finalement les plus pauvres qui contribuent le plus au chiffre d’affaires de la banque ».

La Commission des Finances se saisit du sujet

L’UFC-Que Choisir est évidemment en première ligne pour dénoncer cette « surreprésentation des frais d’incidents dans les revenus de la banque de détail ». L’association de défense des consommateurs évoque également un problème dans le dispositif d’aide à la mobilité bancaire, dont les points de friction auraient provoqué des frais d’incidents bancaires pour 38 % des clients au moment de changer de banque.

Le chargé de mission, Matthieu Robin, élargit le spectre, dénonçant plus généralement à l'AFP « l’inflation globale de chacune des typologies depuis 2009 » avec une hausse du panier moyen de la consommation de « 13,5 % entre 2009 et 2018 ». Sur cette période, il relève une hausse respective de 16 % et 22 % des offres groupées de services et des commissions fixes exclues de celles-ci. Cette période marque aussi la généralisation des frais de tenue de compte, à l'exception des banques en ligne considérées comme les moins chères (pas de commission d'intervention ni de frais pour lettre d'information préalable pour chèque sans provision chez Boursorama Banque et ING par exemple).

De son côté, la directrice générale de la Fédération bancaire française, Marie-Anne Barbat-Layani, se félicite de la confirmation par l’OTS de la tenue des engagements en 2018 « en faveur du pouvoir d’achat, notamment pour les clients en situation de fragilité bancaire ». Un bon point à mettre au crédit de l'image des banques. Néanmoins, la commission des Finances doit lancer une mission sur la façon de réorienter le modèle bancaire en comparant avec ceux des pays voisins. Daniel Labaronne souhaite « un dialogue ouvert et confiant avec les banques, qui manquent parfois de transparence ».



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