Le modèle de la banque en ligne est-il vraiment bousculé par les néo-banques ?

Le modèle de la banque en ligne est-il vraiment bousculé par les néo-banques ?

Les néo-banques s'immiscent dans les interstices laissés vacants par les banques traditionnelles mais aussi par les banques en ligne. Proies, prédateurs ou vautours : quelle est la distribution des rôles dans la chaine alimentaire de la jungle bancaire en pleine ébullition ? Tour d'horizon.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 12 Décembre 2017

Le modèle de la banque en ligne est-il vraiment bousculé par les néo-banque

Les néo-banques, jeunes loups aux dents longues

S’appuyant sur leur agilité et leur simplicité pour être à la fois ambitieuses, innovantes et audacieuses, les néo-banques bénéficient de la vitalité et de la fougue de la jeunesse. Leur rapidité d’exécution leur permet de se spécialiser en très peu de temps sur des services précis qu’elles adaptent à l’expérience client et à l’expérience utilisateur. De plus, les néo-banques bénéficient d’un coût de production relativement faible et d’infrastructure moderne. Cette vague digitale est surtout en adéquation avec les changements de comportements des consommateurs (mobile first, e- et m- commerce, réseaux sociaux, économie du partage, market place, etc.) et la multiplication des apports technologiques disruptifs (authentification biométrique, dématérialisation, blockchain, big data, robots conseillers, intelligence artificielle, etc.).

Pour autant, les néo-banques pâtissent de certaines lacunes liées à leur âge, à l’instar du déficit de notoriété, d’une base client inexistante, d’une faiblesse dans leur réseau de distribution, ou tout simplement d’un manque de moyens financiers. Certaines Fintechs présentent néanmoins une réelle capacité d’entrainement, illustrée par des levées de fonds spectaculaires comme Qonto (10 millions d’euros), N26 (40 millions d’euros), Younited Credit (100 millions d’euros) ou bien Atom Bank (200 millions d’euros). D’autres néo-banques comblent certaines carences en étant adossées à de puissants groupes comme Orange Bank avec Orange, C-Zam avec Carrefour ou Morning avec la banque Edel (E.Leclerc). Mais leur dynamisme remettrait-il en cause l’intérêt pour les "vieilles branches" que sont les banques en ligne qui les ont précédées d’une décennie ?

Les banques en ligne : des pionnières ringardisées ?

Les banques en ligne semblaient avoir le temps de rentabiliser et de valider son modèle économique. En ce sens, l’apparition de nouveaux acteurs les bouscule. En dehors de Fortuneo qui a dégagé un bénéfice net, en 2016, de 9 millions d’euros, toutes sont encore dans le rouge. Leurs pertes cumulées l’an dernier atteignaient la somme de 80 millions d’euros. BforBank cédait 24 millions d’euros, contre 13 millions pour Axa Banque ou 6 millions pour monabanq. Les efforts pour grignoter des parts de marché sont onéreux, même si ING Direct et surtout Boursorma ont franchi l’emblématique seuil du million de clients en 2017. L’arrivée des néo-banques rend-elle vains tous ces efforts ?

La chose positive avec le foisonnement des Fintechs est l’obligation de réagir. Pour autant, les banques en ligne conservent des atouts comme leur position établie, la qualité de la relation client et les tarifs avantageux : gratuité de la carte bancaire, prime de bienvenue, taux boostés de livrets d’épargne, gamme élargie d’offres (jeunes, professionnels, voyageurs), place du conseiller bancaire, etc. Les banques en ligne essaient aussi de s’aligner devant les services innovants mis en place par les néo-banques, comme la gestion des plafonds de retrait et de paiement qui s’est généralisée.

Banque en ligne : le virage du mobile enfin amorcé

En revanche, si les banques en ligne ont été des aiguillons sur la relation client via internet, elles sont clairement en retard sur le virage du mobile. Smartphones, tablettes, montres connectées : les usagers bancaires consultent leurs comptes en ligne et achètent des produits de plus en plus grâce à ces outils. Or, leurs applications mobiles bancaires sont loin d’égaler celles des néo-banques. Elles souffrent par exemple sur certains services : virement par SMS (sauf Hello Bank!), solde en temps réel ou le blocage de la carte bancaire (sauf ING Direct) ou encore la catégorisation automatique des dépenses (sauf Boursorama, Hello bank! et BforBank).

Le paiement mobile, dont les experts annoncent la prise de pouvoir dans les comportements des consommateurs à court terme, commence à peine à trouver écho chez les banques en ligne. Précurseur, Hello bank! permet à ses clients de payer via Paylib sur Android. Poussées par leur maison mère respective, Crédit Mutuel Arkéa et Société Générale, Fortuneo (décembre 2017) et Boursorama (janvier 2018) vont proposer Apple Pay. Frédéric Oudéa, président de la Société Générale, a d’ailleurs souligné « développer à fond Boursorama » suite à l’arrivée de la néo-banque Orange Bank.

De son côté, le Crédit Agricole a décidé de soutenir sa banque en ligne BforBank lancée en 2009. Coincée entre l’offre agressive des autres banques en ligne et l’émergence de Fintech sur son terrain de prédilection, la gestion de patrimoine (Yomoni, Grisbee), la banque verte veut réinjecter 120 millions. Cette annonce vient en parallèle de la commercialisation d’Eko by CA, une offre bancaire low cost mobile à 2 € / mois. Reste à définir ce positionnement sur la banque du quotidien par rapport à BforBank dont l’objectif est d’être bénéficiaire à partir de 2021, en passant de 180 000 à 350 000 clients.

S’il est impossible d’identifier les proies des prédateurs, même si rachats, prises de participation et partenariats esquissent une répartition des rôles, les néo-banques obligent les banques en ligne à redoubler d’efforts. Celles-ci peuvent compter sur la relation client, le contact humain étant toujours essentiel pour les usagers bancaires, tout en devant rapidement travailler l’item de l’expérience utilisateur sur le mobile, sous peine d'être vraiment cataloguées comme solutions has-been par les Millennials.



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