Photographie de l'épargne en France

Photographie de l'épargne en France

Le patrimoine des Français continue de battre des records comme le révélait l'étude publiée par ING au printemps dernier, reprenant les données du rapport de la Banque de France. L'immobilier et les produits d'épargne sans risque dament toujours le pion à l'épargne financière.
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Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 31 Juillet 2018

photo epargne en france

178.200 €, soit le patrimoine financier brut par ménage français

Les ménages français auraient épargné 140 milliards d’euros au cours des trois premiers trimestres de 2017, et déjà 100 milliards sur les premiers mois de 2018. Selon les comptes nationaux, la totalité du patrimoine financier des Français atteint 5.233 milliards d’euros (+ 8,5 % en un an) au 3e trimestre 2017. Cette somme représente un patrimoine financier brut par ménage de 178.200 euros. En le corrigeant des dettes, ce chiffre culminait à 124.600 euros, un score de 15 % supérieur aux voisins allemands (107.700 euros).

Dans ces chiffres, il faut noter que le patrimoine non-financier (7.500 milliards d’euros en 2016) dépasse largement le patrimoine financier mais n’enraye pas les disparités de revenus : 65 % des actifs sont détenus par les 20 % des ménages les plus riches. Environ un sur trois possède un patrimoine financier net inférieur à 30.000 euros, sachant que l’essentiel du patrimoine est orienté vers l’assurance-vie et les dépôts.

L’aversion au risque est particulièrement élevée dans l’hexagone, 8 français sur 10 étant rétifs à faire confiance aux placements en actions. Pourtant, le contexte des taux bas devrait les inciter à flécher leur épargne sur des produits plus risqués mais plus rémunérateurs, notamment avec un taux du livret A gelé à 0,75 % jusqu’au 31 janvier 2020.

L’épargne réglementée toujours privilégiée

Quelques signes laissent entrevoir une inflexion dans le comportement des épargnants français. Ces derniers n’ont placé que 280 millions d’euros au mois de juin sur le Livret A, cette collecte ayant déjà connu un recul en mai (660 millions d’euros). D’après la Caisse des dépôts, les montants déposés sur les Livrets A et les livrets de développement durable et solidaire (LDDS) s’élèvent à 520 millions d’euros, l’encours total étant de 386,7 milliards d’euros fin juin

Néanmoins, le directeur du Cercle de l’Epargne, Philipe Crevel, relativise car « le mois de juin est traditionnellement un mauvais mois pour le livret A ». Il souligne également que « l’inflation et la baisse du pouvoir d’achat lié aux augmentations d’impôt » ont pu jouer « en défaveur du Livret A » au moment où les Français sont aussi amenés à boucler leur budget vacances et à payer le deuxième tiers de l’impôt. Effet conjoncturel ? Possible quand on constate que la collecte du Livret A en 2018 s’établit à 9,11 milliards d’euros, soit quasiment autant qu’en 2017 sur la même période.

L’épargne financière délaissée au profit de l’immobilier

Une étude menée par le cabinet Xerfi relève un changement plus notable dans les habitudes des Français vis-à-vis de l’épargne. Ces derniers ont tendance à plus consommer alors que, parallèlement, le nombre de ménages qui estime qu’épargner est pertinent continue de baisser. Depuis 2009, les chiffres montrent une progression du revenu brut disponible (+12 %), concomitamment à une hausse de la consommation (+14%) et à une contraction de l’épargne (-2,1 %). L’épargne financière a même dévissé de 27,2 %, pendant que les investissements immobiliers bondissaient de 17 %.

Crise financière oblige : les Français plaident pour la pierre plutôt que l’épargne financière. Cette tendance s’inscrit évidemment dans le contexte de taux d’intérêt bas des crédits immobiliers. Mais aussi par le fait qu’un quart des Français juge que l’immobilier est le meilleur choix d’investissement qu’ils ont fait au cours de la dernières décennie, selon une enquête de la société de gestion d’actifs Legg Mason. L’immobilier représente 29 % de l’actif brut des ménages.

1,83 %, soit le taux servi des fonds à capital garanti de l’assurance-vie en 2017

L’assurance-vie est l’autre produit d’épargne plébiscité par les Français. Au cours du premier semestre 2018, la collecte est de 72,4 milliards d’euros contre 68,3 milliards sur la période équivalente l’an passé. Les retraits ont atteint 60,1 milliards ce qui fait que la collecte nette est de 12,2 milliards d’euros (2 milliards jusque pour le mois de juin). L’encours des contrats d’assurance-vie connaît une hausse annuelle de 3 %, grimpant à 1.701 milliards d’euros.

Cette bonne tenue peut paraître surprenante quand on sait que le rendement des fonds euros garantis ne cesse de décroitre. Ainsi, comme l'a rapporté ce 18 juillet l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le taux servi des fonds à capital garanti de l’assurance-vie est de 1,83 % en moyenne en 2017. Pour rappel, il était de 3,90 % en 2008 et de 1,93 % en 2016. Malgré une chute endiguée, les résultats divergent selon les distributeurs de l’assurance-vie : 1,67 % pour les banques, 2,07 % pour les assurances non-liées à un établissement bancaire, 2,33 % pour les mutuelles et 2,66 % pour les instituts de prévoyance.

Le difficile virage entrepris pour promouvoir les unités de compte

L’aversion au risque est toujours bien ancrée dans les représentations des ménages français. Les fonds garantis en euros accaparent 80 % des sommes placées. Toutefois, certains commencent à comprendre que les rendements servis avoisinent le niveau d’inflation, leur faisant perdre du pouvoir d’achat. Le gouvernement pousse en ce sens et souhaite, via la loi Pacte prochainement examinée au Parlement, parvenir à réorienter plus franchement l’épargne vers les actions et l'assurance vie en unité de compte.

Cyrille Chartier-Kastler, président-fondateur de Facts & Figures souligne que « les assureurs font pression pour juguler les entrées sur les fonds euros. ». Comment ? En introduisant par exemple des conditions d’investissement sur leurs fonds euros. Les assureurs exigent qu’un certain pourcentage des sommes placées le soit sur des supports en unités de compte. D’autres délivrent des fonds euros bonifiés, là encore sous condition de placement d’une certaine somme sur des supports plus risqués. Trois raisons les incitent dans cette démarche commerciale : la baisse des performances des fonds euros, la consolidation des marges de solvabilité pour les fonds euros qui rend plus couteuse la vente de ces supports, mais surtout des frais de gestion plus rémunérateurs (1 % sur les unités de compte contre 0,4 % à 0,8 % pour les fonds euros).

Cette volonté fera-t-elle bouger les Français dans leur stratégie d’épargne ? En juin, les versements sur les supports en unités de compte étaient de 30 % des sommes placées (3,7 milliards d’euros pour 12,3 milliards de collecte brute). En 2017, les contrats d’assurance-vie multisupports plus risqués avaient attiré 28,4 %...



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