Comment les banques traditionnelles traversent-elles la tempête dans le contexte de pandémie et de taux bas ?

Comment les banques traditionnelles traversent-elles la tempête dans le contexte de pandémie et de taux bas ?

Les banques ont réalisé un premier trimestre 2021 intéressant malgré la pandémie. Toutefois, la politique de taux bas de la Banque centrale européenne continue de comprimer les marges sur les crédits. La banque de détail doit donc faire des économies et accroître ses revenus.
Banques en ligne

Rédigé par Olivier BALBASTRE

le 08 Juin 2021

Comment les banques traditionnelles gèrent-elles la pandémie ?

Avis de beau temps pour les résultats trimestriels des banques françaises

Dans le contexte houleux de crise sanitaire, les banques françaises maintiennent le cap avec de bonnes performances décrochées au premier trimestre 2021. Rappelons que les premiers mois de 2020 avaient été marqués par l’ouragan de la pandémie, entrainant les marchés financiers vers les abysses en mars.

Actuellement, les groupes bancaires profitent de courants porteurs qui gonflent leur bénéfice net : +38% pour BNP Paribas (1,8 milliard d’euros), +92% pour le Crédit Agricole (1,75 milliard d’euros) et +203% pour BPCE (548 millions d’euros). La palme de la flotte revient à la Société Générale qui passe d’une perte de 326 millions d’euros au T1 2020 à +814 millions de bénéfice net au T1 2021.

Les banques françaises partagent cette trajectoire avec leurs homologues européens grâce aux conditions anticycloniques qui règnent dans le ciel des marchés financiers. Illustration avec l’indice du CAC40 qui est passé de 5589 points au 1e janvier à 6067 points au 31 mars 2021 (+85,52%), ou du Nasdaq qui a franchi le cap des 13 000 points (de 12 698 points à 13 247 points, +43,32%).

Si les groupes bancaires sont parvenus à réduire le montant de leurs provisions pour amortir l’impact des impayés de crédit, la météo économique reste suspendue à l’ouragan Covid-19 et à l’efficacité des campagnes de vaccination. Bien que la hausse des taux d’intérêt souffle dans les voiles des banques (l’OAT de 10 ans de la France était à -0,343% au 1er janvier contre +0,154 ce 5 juin), la politique de la BCE est un écueil pour la rentabilité des activités de banque de détail.

Digital : une zone économique non exclusive pour les banques traditionnelles

Les banques se donnent du mou en cherchant à l'horizon des économies. Comment ? Guidées par leur boussole, elles abaissent la grand-voile de la masse salariale, route la plus directe pour alléger les coûts structurels, et favorisent le développement du digital. Une stratégie payante puisque le confinement, les mesures de geste barrière et le télétravail ont contribué à changer durablement les usages des clients.

Une étude D-Rating a montré que l’utilisation des canaux bancaires numériques avait explosé depuis la crise sanitaire. Les applications mobiles sont plus fréquemment ouvertes, les opérations en ligne sont plus nombreuses et les temps de connexion sont plus élevés. L’étude précise que les banques historiques disposent désormais d’applis fonctionnelles. En les combinant à une offre de produits et de services plus riches, elles prennent même la tête de la flotte des acteurs bancaires.

Mais une catégorie d’acteurs surfe aussi sur cette vague : les banques en ligne de première génération. Avec des prix très attractifs autour de la gratuité du compte courant et de la carte bancaire, Fortuneo, ING ou Hello bank! embarquent de nouveaux clients. L’enquête D-Rating couronne d’ailleurs Boursorama Banque comme l’établissement offrant la meilleure expérience bancaire et la plus complète.

Nuançons en rappelant que ces banques en ligne appartiennent toutes…aux banques traditionnelles : Boursorama Banque (Société Générale), Hello bank! (BNP Paribas), Fortuneo (Crédit Mutuel Arkea), Monabanq (Crédit Mutuel Alliance Fédérale), BforBank (Crédit Agricole). Ces frégates 100% dématérialisées servent aussi de propulseurs au vaisseau-amiral en harponnant certains segments de la clientèle.

Par exemple, ces navires très agiles croisent dans la mer des clients professionnels. Une navigation loin d'être à l'aveugle tant la période de pandémie coïncide avec une envolée du nombre de travailleurs non salariés. Les banques en ligne lancent des solutions de comptes pro (Boursorama Pro, Hello Business, Monabanq Pro), pendant que le paquebot-amiral arraisonne d’autres bateaux, à l’image du rachat de Shine par la Société Générale.

Autre gisement de ressources : l’exemple du conseiller spécialisé payant chez BNP Paribas

Comme les cartes nous l'ont révélé précédemment, le bon début d’année 2021 n’occulte pas la fragilité des activités de banque de détail (marges des crédits pressurisées). Si l’amélioration de l’expérience client sur le numérique et les coupes dans les effectifs redressent la barre, la recherche de nouvelles ressources est une oxygénation nécessaire.

Ainsi, BNP Paribas prévoit de réviser sa tarification en facturant le conseil client. Suite à des tests grandeur nature, la banque vient d’annoncer la généralisation de l’accès payant au conseiller avec un forfait mensuel fixé à 12 euros. Ce service optionnel devrait être proposé à la rentrée de septembre.

Attention, BNP Paribas ne supprime pas pour autant le conseiller de proximité, ce quartier-maitre toujours accessible gratuitement par la clientèle du paquebot. La directrice des réseaux France chez BNP Paribas, Marguerite Bérard, estime que l’offre « s’adresse à 10 ou 15% de nos clients ayant besoin d'un conseil renforcé en matière d'épargne financière, de retraite ou de prévoyance. »

L’idée consiste à faire payer des produits et services apportant aux clients une valeur ajoutée supplémentaire. Une attention souvent mise en avant dans les enquêtes sur les attentes des passagers bancaires. Pour l’heure, les équipages concurrents de BNP Paribas restent attentifs à la question, mais ne comptent pas mettre à l'eau cette nouvelle ligne tarifaire dans leur brochure.

En revanche, toutes les banques se penchent sur la question, hésitant sur la pertinence d’un tel service payant. Le drapeau en berne de la fréquentation des agences bancaires ne signe pourtant pas le grand plongeon vers le client 100% autonome. Au contraire, ce croisiériste veut plus de conseils, mais sur des sujets précis auprès d’experts spécialisés.

Problème, les conseillers traditionnels sont trop généralistes pour répondre à cette requête. D’où les plans de formation en interne, afin de les faire monter en grade, et la stratégie de dérouter les opérations bancaires du quotidien vers l’espace en ligne et les applications bancaires. Nul doute que les flottes concurrentes scruteront aux jumelles le sillage laissé par BNP Paribas et l’attractivité de ce service extra-financier.  



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